A la rencontre du destin.

https://www.youtube.com/watch?v=wqcu_tNZAuM


La nuit était tombée et la nature bruissait de mille sons. Choqués par les événements récents, ils marchaient inquiets, prêtant attention à tout ce qui les entourait. Alors qu'au fur et à mesure de leur marche ils montaient vers le sommet, la végétation se faisait plus rare et le vent fouettant. Nul n'osa proposer de pause après l'échec total de la dernière. Parfois de grands rapaces volaient au-dessus d'eux, se découpant sur le ciel étoilé. Au détour du sentier, ils aperçurent Forge-Rune qu'ils surplombaient à présent. Leur avancée était extrêmement dangereuse, un seul faux-pas pouvait mener à la chute mortelle en contrebas. Mais Gérard les guidait surement, ses compagnons ayant une totale confiance en lui, confiance qui avait été plus que justifiée jusque là. Les minutes s'écoulaient une à une, devenant des heures. Chaque pas semblable était répété de manière machinale, répétitive.
Enfin, le chemin s'arrêta net. A sa gauche, la pente coulait vers la vallée et la ville. A sa gauche, une pente douce d'herbe verte montait jusqu'à une grotte à la bouche immense posée sur un nid de roche. La grotte brillait d'une forte lumière jaune, si bien qu'il était impossible de discerner quoi que ce soit à l'intérieur.
Soudain, ils entendirent une mélodie entraînante et vive de violon (voir lien ci-dessus absolument) accompagnée d'une respiration incroyable, telle le souffle d'un énorme soufflet de forge. Owein, qui commençait à avoir froid, commença à courir vers cette promesse de foyer. Il fut bientôt suivi par Ryooo et Gérard. Ils trouvèrent rapidement l'escalier taillé dans la roche qui menait jusqu'à l'antre, et pénétrèrent dans celle-ci.
Sa grandeur ne semblait pas naturelle. Eclairée par milles lustres et flambeaux, elle s'étirait, soutenue par des pilliers de pierres et trouée de nombreuses cheminée. Au fond, des pilles de coffres et de malles de toutes sortes s'empilaient jusqu'au plafond. Au centre, d'immenses enclumes sommeillaient, surplombées par des chaînes recouvertes d'outils diverses et variés. Près de l'entrée, un espace occupé par un hamac, une table et quelques armoires annonçait la présence d'un Homme. Il y avait en réalité deux êtres vivants devant eux.
Le premier, ressemblant à un homme âgé d'une trentaine d'années, fort bien bâti et élégant, jouait du violon, un pied sur un guéridon. Ses cheveux courts châtains s'étiraient en pâtes dessinées sur un visage fin. Ses yeux, bien que pétillants, étaient si profonds et semblaient avoir vu tant de choses qu'ils ne semblaient pas humains. A côté de lui, une créature profitait lascivement de la charmante mélodie. C'était en réalité un Dragon de couleur d'or, très vieux, car les dragons ne cessent jamais de grandir au fil de leur vie, et la taille de celui-là dépassait l'entendement. A chacune de ses titanesques respirations, son ventre craquelé se soulevait, puis en expirant un brasier s'allumait au fond de ses narines, lâchant quelques bouffées de vapeur.

Les trois compagnons étaient estomaqués. Même Gérard et son sang-froid légendaire semblait bouche bée. L'homme continuait de jouer du violon. Des flammes semblaient palpiter dans l'air, telle une brume orangée dans laquelle se perdait le feu de la passion. L'instant était magique pour tous, c'était un vrai rêve éveillé. Oui, la salle aurait du être sombre car la nuit était tombée, pourtant, elle était éclairée par un gigantesque feu, et un festival de couleurs dansait autour d'eux. Ils n'avaient jamais vu de pièce aussi grande de toute leur vie. Le moment restait figé sur l'air de violon de l'homme, qui avait ralenti sa mélodie, ou bien était-ce l'émerveillement qui les hantait qui faisait se suspendre le temps lui-même ? Personne ne le savait.

L'homme s'arrêta de jouer.

Comme un seul homme, les trois compagnons expirèrent. Ils avaient retenu leur souffle pour ne pas gêner la musique, sans s'en rendre compte.

<<Bienvenue, messeigneurs !>>

Il avait lancé cette phrase sur un ton amical, joyeux et terriblement triste en même temps. Le dragon dormait paisiblement. Tétanisés, les trois compagnons ne bougeaient pas le petit doigt. Ce fut Gérard qui, le premier, trouva la force de s'avancer et de prononcer ces paroles :

<<Je vous salue et vous suis reconnaissant d'agréer...
-Allons, coupez court à toutes ces sottises ! Je suis lassé de cette hypocrite politesse qui règne partout en ce monde...>>

Avec ces mots, tous comprirent qui était l'Homme. Ils s'agenouillèrent devant lui et regardèrent le sol. Il parut s'en amuser et joua un petit air passionné avec son violon, avant de le reposer sur une table. La salle était véritablement gigantesque. Qui pouvait bien avoir été capable d'une telle prouesse architecturale ? Ils se relevèrent, soudain moins contractés. Le petit air que leur avait joué l'homme les avait détendus.

<<Vous connaissez tous le pouvoir de la musique, n'est-ce pas ?>>

Il sourit. Il semblait beaucoup plus joyeux, tout d'un coup. La tristesse s'était envolée de sa voix. Ses yeux semblaient percer leurs masques, leurs vêtements, pour regarder leurs âmes. Celle de Gérard semblait pourtant insondable. Comme s'il n'y avait rien sous son manteau.

<<Je me nomme Túrin, et je vous regarde depuis des temps immémoriaux. Je suis vieux et fatigué. Vous êtes sans aucun doute de puissantes personnes, pour avoir réussi à venir jusqu'ici.
-Pas vraiment... Nous ne sommes pas puissants. Sire.
-Voyons ! Qu'est-ce que la puissance ? Il ne s'agit pas d'une magie destructrice ou d'une montagne de muscles.
-Mais alors, comment devenir puissant ?
-Vous le découvrirez par vous-mêmes.>>

Un grand sourire éclairait son visage.

<<Je reçois très rarement de visite. Mais faites comme chez-vous ! J'espère que vous allez rester pour la nuit. Vous n'y verriez rien sur le chemin du retour !... Ou peut-être que si. Mais les démons vous auraient encerclé.
-Alors c'est donc vrai. Mes craintes étaient fondées.
-Oui, Gérard. Il va vous falloir agir très vite, à présent. Et je ne pourrai pas vous aider. Puis-je vous raconter une histoire...? Allons ! Je ne vais pas vous ennuyer avec cela, vous êtes fatigués, je vous ai attendu toute la journée, venez dîner avec moi !>>

L'atmosphère devint très confortable. C'était un lieu hors du temps et de l'espace que cette pièce aux proportions irréelles. Ils prirent tous place sur quelques coussins aux textures joyeuses, autour d'une table où arrivèrent de fabuleux mets, comme ils n'en avaient jamais goûté. Ils n'avaient pas mangé la veille, et n'avaient pris qu'un maigre déjeuner sur la route, c'est pourquoi ils firent un grand honneur à ce repas. C'était un véritable festin. Ils ne connaissaient pas le quart des ingrédients, c'était une symphonie gustative. Le vin était le meilleur cru de tous les temps, réchauffait agréablement les membres, éclaircissait les idées et le corps. Gérard, qui était pourtant d'un naturel très réservé, ne mangeant que peu et ne buvant presque jamais, réussit à finir la moitié de son assiette. Il ne toucha pas au vin. Owein, en revanche, semblait être son penchant opposé et mangea et but jusqu'à s'en exploser la panse. Son compagnon ailé était arrivé au cours du repas. Réunis, ils ne formaient qu'un. La salle était orange. Ryooo avait pu réfléchir un moment. La présence qu'exerçait Gérard sur eux était quelque chose de singulier et de très étrange, elle les poussait à le suivre et à lui obéir, mais la présence de Túrin, elle, était bien plus grande et bien plus subtile. C'était un personnage dont il émanait un charisme incroyable, chacune de ses paroles était une poésie raffinée, chaque syllabe était un petit trésor. Son sourire savait faire passer toutes les émotions du monde. Ryooo aurait aimé sourire comme cela. Peu à peu, leurs langues se délièrent, ils parlaient de tout et de rien, se racontaient des blagues... Sauf Gérard, qui les regardait avec un petit sourire en coin, sans que personne ne sache à quoi il pensait. Enfin, Túrin croisa son regard. Il était le premier être vivant à l'avoir regardé dans les yeux. Son sourire disparut. Ils se toisèrent silencieusement quelques minutes... La tension était à son comble. Puis, Gérard bailla. L'ermite de la montagne souffla. C'était d'abord un petit gloussement, puis il commença à ricaner. Enfin, il éclata de rire, il ne put se calmer pendant plusieurs minutes. Inquiets, Owein et Ryooo se penchèrent sur lui. Il pleurait aux larmes. C'était un rire incroyablement sincère et frais. Il se redressa et essuya ses yeux humides.

<<C'est très intéressant ! Vous êtes vraiment très intéressant, Gérard. Je n'aurais jamais cru pouvoir rencontrer quelqu'un comme vous. Ainsi... Ainsi, c'est... C'est comme cela.>>

Il rit encore un peu. Gérard était absent. Il tripotait nerveusement quelque chose sous sa cape.

<<Plusieurs personnes manquent à cette réunion. Vous n'êtes que trois. Les évènements ne se sont pas tous passés comme il était prévu... Les destins et les désirs s'entrechoquent, encore et encore, comme une nuée de papillons aux répercussions gigantesques... Je ne sais pas ce qu'il adviendra de vous, hélas. Gérard, Owein, Ryooo, quel chemin allez-vous suivre...?>>

Les paroles énigmatiques se succédaient. Túrin était intarissable. Sur les cinq membres qui s'étaient rencontrés à la taverne, seuls deux étaient arrivés à terme aux côtés de Gérard. Laly suivait son chemin, Gérard lui parlait à travers un artefact magique, en un sens c'était étrange, mais ils étaient liés. Ils étaient un véritable couple inséparable, en théorie, pourtant, il était venu jusqu'ici sans elle. Personne ne savait pourquoi il s'y était attaché. Ryooo l'avait à peine vue. Le jeune homme aux lunettes avait rejoint Gérard, à la taverne. Túrin semblait excessivement surpris de sa présence. Quant à Kalannar... Il allait bientôt être exécuté. L'inconnu... Gérard et Ryooo ne l'avaient même pas vu personnellement.

<<Avant de commencer mon histoire, j'aimerais parler à chacun de vous, en privé. J'aimerais que vous me racontiez vos histoires. Cette rencontre changera le destin du monde, que vous le vouliez ou non.>>

(Alt + 163, sans majuscule)

Túrin était un grand héros d'autrefois, sinon le plus grand. Il avait décidé de se retirer tout en haut de cette montagne, voilà bien longtemps. Dernier descendant de la lignée de Forge-Runes, il avait hérité de l'art secret qui consistait à graver des runes sur des objets pour leur conférer des pouvoirs magiques. Il vivait en compagnie d'un gigantesque dragon doré, du nom de Doré. Doré n'était pas le vrai nom de Doré, mais Doré était plus simple pour Doré, le dragon Doré. Ainsi Túrin aimait tourmenter les esprits des gens qu'il rencontrait. Il possédait des pouvoirs magiques qui l'avaient élevé au sommet du pouvoir, un art et une connaissance de la guerre prodigieux, une intelligence des plus phénoménales, et avait toujours un corps aussi affuté que son épée malgré les siècles d'inactivité. Il s'était hissé au rang de légende, puis de dieu vivant. Túrin.

Mais personne n'échappe à la vieillesse, fût-il l'égal d'un dieu. Il paraitrait qu'il subirait un terrible contrecoup s'il se laissait aller à la magie. Il utilisait ses dernières forces pour garder sa présence sur terre. Extrêmement fatigué, il se réjouissait sincèrement de voir cette compagnie.

Il ne désirait pas entendre leurs longues histoires et leurs douloureux passés, seulement leurs motivations et quelques mots de leur part. Il voulait dialoguer avec eux, les conseiller. Il voulait les tester.

<<Allons, n'ayez point peur de ce dragon. Il est mon seul ami et mon frère. C'est la créature la plus sage au monde. Racontez-moi plutôt ce qui vous amène ici...>>

Mon Histoire


Ryooo n'était pas très grand. Un mètre soixante-cinq, tout au plus. Il s'assit en face du Vieux Turin.
Les lèvres closes, le jeune-homme redressa son cou, regardant le perçant regard du " dieu-vivant". Il n'était pas impressionner par la personne de Turin, ni par Celle du Dragon. Ryooo aimait les Dragons. Et pour cause. Ses aventures l'avait mener à rencontrer la personne la plus dangereuse du monde, pour lui.
Il rajusta sur son nez ses lunettes, d'un mouvement droit de son index. Et se frotta les mains en rond, pour se les réchauffer avant de commencer son récit.
Le Jeune-homme décrocha sa cape, et soupira quelques mots. Puis il reprit à voix haute, envers Turin.

-Je.. Je n'ai pas grand chose à dire, Grand Turin. Balbutia-t-il. Ma vie n'apporte que des mésaventures en ce bas monde si peu connu de ses habitants. Mes parents sont décédés. Ne me laissant que pour héritage, quelques objets, un cheval, une brave nourrice qui maintenant les a rejoins, je ne sais où. Je erre depuis, grandissant dans les aventures d'enfants à l'imagination trop grande pour être comprise. Jusqu'au jour ou je l'ai vue. Elle était tout le symbole. Tout l'Univers. Et, Elle se cachait. Pourchasser par ses propres Gardiens . La Princesse du Soleil. Fille de L'empereur. Cachée et gardée par des soldats sur-entrainés. Dans un élan de bravoure, je l'ai tiré des griffes de ces gens brusques, risquant ma vie pour la sienne. Elle avait déjà reçut ma confiance, et me donna la sienne ensuite.Son terrifiant pouvoir, était lié aux animalitos, mais en plus puissant, et moins compréhensible. Je fut obligé de partir, et de la laisser aux soins de ses Gardiens et gardiennes. Car ses soldats étaient aussi des femmes. De véritables tueurs, mêlant maitrise et dextérité. Je du jurer de garder son secret. Et, alors que je m'enfuyais vers la Capitale elle-même. Me recueillant dans la bibliothèque. L'éclair d'un instant je compris que je devais faire et réaliser. Je me devais de réaliser son rêve. Si les gens rêvent de posséder des pouvoirs, elle souhaitais juste être normale et ressembler aux autres jeunes-femmes.
Je descendais calmement une ruelle. Distraitement. Je m'arrêtais à une auberge. J'y rencontre un Jeune-homme; à peine plus jeune que moi, à sa démarche. Son visage et caché. Il est très gentil et amusant.Je me lie d'une certaines amitié avec lui. Je deviens un de ses compagnons de voyage, pour cette grande quête. Tandis que la Princesse me guide. M'envoyant des signaux par la puissance du soleil et de ses Rayons. Et depuis, accompagné du Brave Oweïn, de Gérard, et d'autres, je suis le chemin qui se dresse devant mes pas. Accueillant l'aube dans mes bras.

Túrin eut un sourire chaleureux vers Ryooo. Doré roupillait toujours paisiblement, mais il écoutait quand même les conversations.

L'ermite de la montagne aimait bien ce petit bonhomme. Honnête, droit, et incroyablement niais. Tout comme lui l'avait été, à une certaine époque, ou plutôt, une de ses connaissances l'avait été... Se baigner d'illusions était malheureusement impossible en ce monde... Ryooo l'apprendrait à ses dépens.

<<Ce monde manque cruellement de gens naïfs. Ne le prenez pas mal. C'est une chance de vivre dans un monde plus gai. Et pourtant, vous avez vu un passé sombre et froid, même si vous m'avez caché des choses, ou alors vous les avez oubliées. Votre tristesse doit être très grande et très lourde, si je puis m'exprimer ainsi ; vous êtes quelqu'un de très fort pour avoir surmonté cette peine. C'est admirable. Vous deviendrez quelqu'un de fort.>>

Ils revinrent auprès d'Owein et de Gérard, ils s'étaient levés et avaient juste fait le tour de la salle en marchant. Túrin paraissait rieur et enjoué, pourtant, on pouvait lui déceler une certaine tristesse dans sa voix et surtout dans ses yeux...

Doré avait écouté l'histoire. Il était très attentif aux hommes, mais portait envers eux un jugement bien plus noir que son compagnon Túrin. Le dragon avait vu des histoires bien plus horribles que celle de Ryooo.

(Il fait nuit, mais c'est pas grave.)

(bah chez moi, il fait jour, na )
(et en plus, le temps que je raconte mon histoire, et que l'ermite réponde, l'aube c'est déjà levée =p)

(désolé pour cette absence prolongée, mais je reprends du service! Excusez la qualité du rp et les fautes d'orthographe, j'étais un peu fatigué^^)
https://www.youtube.com/watch?v=zi8CUdK3HY0&feature=related

Túrin hocha pensivement la tête

"Merci pour ton récit, Ryooo, tu as joué carte sur table, j'apprécie cela. Je crains que vous ne deviez rester éveillés une grande partie de la nuit, et nous attendons encore des invités, je vais vous chercher de quoi tenir."

il recula vers son hamac, et sortit d'un coffre non loin une cassette ouvragée ainsi qu'un pot en terre cuite. C'était la meilleure herbe à pipe de la région, accompagnée de magnifiques pipes longues et sculptées. Owein, en amateur, après avoir remercié leur hôte, prit entre ses doigts fins l'une d'entre elles et tandis qu'il la bourrait, il prit la parole.

"Et bien, j'imagine que c'est à mon tour... Ce sera cette fois une histoire sans musique ni chansons. Pas la peine d'aller vous le raconter plus loins, si je dois leur cacher des choses, je le ferais également à vous."

Le ménestrel alluma sa pipe en tirant de longues bouffées, puis entama son récit:

"Je viens de l'ouest mes amis. L'extrême-ouest, la côte déchiquetée par l'assaut incessant de la houle, celle qui court depuis le midi pour se perdre dans le septentrion. Là où les Animalitos sont traités comme égaux des hommes, et là où les anciennes traditions n'ont jamais cessées de vivre. C'est là que je suis né, dans un petit village portuaire qui ne vous dira rien si j'évoque son nom. Je me suis attelé très tôt à l'apprentissage du Luth sur l'instrument de mon grand-père qu'il avait construit durant ses périples maritimes. Pui j'eû la chance, pour être un grand ami du second fils du seigneur du coin, d'avoir accès à toutes sortes d'instruments. Aucun ne me posais en réalité beaucoup de problèmes, et fasciné ce petit seigneur provincial s'engagea à me financer une année complète à la prestigieuse académie des arts de la Boissière. La ville se trouvait à un peu plus d'une semaine de marche de ma bourgade, mais je ne partis pas seul. Mon ami, Gaheriet, partait pour l'école de chevalerie afin de remplir son rôle de second fils de seigneur."

Owein termina se phrase lentement. Perdu dans les limbes de son passé, il se servit une chope de vin épicé, bu doucement une, deux, trois gorgées, s'essuya la bouche, et continua.

"J'avais alors à peine 13 ans. Mon camarade un de plus. C'est au deuxième jour de marche, durant une pause déjeuner que je rencontrai Carrock. Je jouais une mélodie sautillante au luth, et il me répondit. Nous avons continué pendant des minutes et des minutes, et depuis nous ne nous sommes plus quittés.
Le troisième jour fut ma première rencontre avec le seigneur démon, celui qui chasse accompagné de son molosse les nuits de lunes rousse. Le seul des Dieux mauvais à avoir échappé à l'enfermement au fond du "puit". C'était à un carrefour de trois chemins, près d'un à-pic surplombant la mer. Il se tenait, nonchalant, adossé sur une charette remplie de charbon. Il était habillé de manière très soignée, un peu démodée, avec un élégant plastron ciselé, des bottes de cheval plus noires que l'onyx et un fleuret fin et pointu à la taille. Son teint avenant était souligné par une délicate moustache en pointe. Il voulu engager la conversation avec nous, tenta de nous inviter à dormir chez lui à deux pas d'ici... Les hauts membres de la guilde des animalitos ne lui en laissèrent guère le temps. Il y avait An-du-skreo, cette légende vivante, et ses compagnons, tous plus impressionants les uns que les autres, armés jusqu'aux dents et accompagnés de leurs familiers. Ils jaillirent de nulle part, à l'assaut de cette charette en ruine. Le charbon se mit à trembler, vibrer, puis il s'amassa pour former un énorme molosse aux yeux de braises. Un combat formidable s'engagea, et dans un grand fracas, le molosse fumant sortit de la mêlée pour fondre sur moi. Pris de panique, j'étais acculé à la falaise. Carrock m'appella alors en piaillant, depuis le vide. Je ne saurais vous dire par quel moyen je fus assez irrationnel pour me jetter dans le vide, mais je le fis, et les rochers ne me déchirèrent jamais. Ma nature d'animalitos m'était révélé ce jour. Aigle majestueux, je m'amusais à prendre divers courants aériens de manière totalement instinctive. Il en fut de même pour Gaheriet, qui devint renard gallopant à travers les fourrés. Nous voyant ainsi, les animalitos battirent en retraite, nous escortant jusqu'à leur base. Jamais je n'attins l'Académie.

Ainsi je devins membre de la guilde. Je fus présenté à la déesse Morrigane, encadrée de sa rousse chevelure et habillée de ses tatouages entrelaçés. je ne peux vous répéter toutes ces discussions que j'ai eu là-bas, ce serait trahir un serment. Mais le fait est qu'introduit dans les hautes sphères de la guilde, j'eû tous les livres dont je rêvais, et tous les musiciens possibles pour m'enseigner leur art. Mon compagnon s'entraîna sans relâche et devint Gaheriet le fracasseur, sans égal au combat à la hache. Moi, je servis pour quelques missions itinérantes, exerçant par la même occasion mon métier de ménestrel.Les années passèrent doucement, et les voyages formant la jeunesse, nous vîmes une bonne tanche de pays. An du skreo lui même m'emmena dans ses périples, et je devais avoir vers les dix-huit ans quand nous allâmes dans le grand nord, An du skreo, Gaheriet, Katell -une animalitos avec qui j'eû une relation amoureuse- et moi-même. Nous pourchassions Braen, un traître à la guilde très puissant qui se changeait en serpent, et tentaît de rejoindre la secte de la Lune-sanglante vouant un culte au seigneur Démon pour leur avouer la localisation des quartiers de la Guilde des Animalitos, et ainsi précépiter notre perte. Perdu dans la neige, je crus mirer SASEB lui-même, sur un pic, cape rouge sang au vent, tout en armure, observer Outgard, la montagne qui tient en son ventre le Puit."

Owein s'arrêta, sa voix étranglée. Une minuscule larme coula sur sa jour gauche, qu'il n'essuya pas. Ses mains tremblaient.

" Une fois tous mes compagnons retrouvés, nous allâmes à l'attaque de Braen. Le combat fut terrible, car il était déjà accompagné de soldat fanatiques de la Lune-sanglante. An du skreo dansait d'une chorégraphie mortelle, Gaheriet éventrait armures et torses, Katell les arrosaient de flèches et je les soutenaient tant que je pouvais avec une rapière. Ce jour-là, j'ai tout perdu. Gaheriet se fit enserrer per les anneaux de serpent de Braen qui lui brisa les vertèbres, mon aimée fut sauvagement égorgée, et An du skreo, voulant rattrapper les survivants qui fuyaient ses lames jumelles, disparu à jamais dans le brouillard de la montagne, et personne ne le revit.
Nous avions triomphé, mais à quel prix? Par miracle, Gaheriet survécu, mais il n'avoua à personne son terrible handicap qui lui imposait mille tourments, chargeant tout de même à l'assaut la hache à la main.

Je ne voulais plus entendre quoi que ce soit à propos de la Guilde. Parcourant les villes et villages, je jouais dans les tavernes pour quelques sous, tentant d'oublier mes braves compagnons. C'est à Deux-cent tours, après avoir quitté l'auberge, que je croisais de nouveau Gaheriet. Il me déclara que la Guilde l'envoyait à Forge-Rune pour une mission. Je lui ai proposé de l'accompagné, et un rendez-vous fut fixé à l'orée d'un bois. Mais la garde s'en prit à nous et nous nous séparâmes pour nous retrouver à vos côtés, voilà toute l'histoire, à quelques détails près. A vos côtés, je perdis mon ami d'enfance, et léssivé je suis arrivé à Forge-Rune, et j'ai entendu votre voix, Túrin."

Gérard avait écouté les histoires silencieusement. Il n'y avait aucune autre musique autre que celle du ronflement de Doré, et la voix du ménestrel n'était emprunte d'aucun rythme particulier, lui qui s'exprimait si souvent par vers et par figures de style, avait abandonné ses lyriques paroles pour conter son histoire... Gérard semblait l'avoir remarqué, mais il n'avait rien dit. Personne n'avait rien dit. C'était l'histoire de la vie d'Owein. Tous observèrent un long moment de silence après la fin du récit, jusqu'à ce que Túrin ne hoche la tête avant de commenter :

<<Owein, c'est une terrible histoire que vous nous avez conté, et je suis sincèrement désolé pour vos amis. J'ai vu Gaheriet tomber sur le chemin. J'ignorais cependant qu'il s'agissait d'un compagnon d'aussi longue date. Et à présent qu'An du Skreo a disparu, vous êtes le seul être vivant pouvant encore témoigner de ces atrocités. J'espère que vous trouverez en vous le courage et la force de pouvoir dépasser la mort de feu vos camarades...>>

Sur quoi, Gérard se retourna. Il semblait infiniment sombre, plus encore que d'habitude. Owein était assis juste à côté de lui. L'homme sans visage le regarda intensément. Il leva sa main, sembla hésiter un instant, tout son bras tremblait. Il tremblait comme s'il avait légèrement froid. Personne n'aurait pu dire s'il pleurait ou pas. Sa main parcourut l'espace entre Gérard et Owein, se posant avec une infinité de précautions sur son épaule. La capuche s'abaissa, comme si elle regardait le sol. Ce fut cette même capuche qui marmonna quelques mots. Dont fut distinguable un seul.

<<Owein...>>

Sur quoi Gérard se retourna vers la porte d'entrée. Une nouvelle arrivante. C'était Laly. Sa petite silhouette se détachait faiblement de la nuit. A ses côtés, son familier, Eliot, arborait un air féroce.

Elle avait mis un temps fou à arriver, mais en suivant les instructions de Gérard, elle avait fini par rentrer dans la petite maison. Tout le monde se retourna vers elle, c'était une grande surprise. Personne ne s'attendait à la voir débarquer. Gérard se leva et marcha pour accueillir la jeune fille en la prenant par la main et en la guidant vers un des sièges.

<<Je ne vous l'avais pas dit, mais Eulalie est avec nous depuis un long moment déjà. Elle a suivi la totalité de nos aventures, grâce à un artefact que je lui ai donné avant notre séparation. Elle a donc entendu tout ce que nous avons dit...>>

L'homme à la capuche était soudainement devenu plus attentionné, il prenait un nombre de précautions infini à s'occuper de son amie. Il l'aida à s'assoir, lui servit du thé, lui demanda si elle était blessée, comment avait été le voyage, tout un tas de questions auxquelles elle ne répondait que vaguement, d'une voix très faible. Elle avait l'air à bout de forces. Lorsqu'Owein commença à lui parler (car ils se connaissaient), Gérard l'interrompit. Les mots tombèrent.

<<Elle a perdu la mémoire.>>

Un silence gêné s'installa. Túrin semblait circonspect. Il tira une bouffée sur sa pipe, fronçant les sourcils.

<<Gérard, comment est-ce arrivé...?>>

L'homme invisible ne répondit pas immédiatement. Il resta immobile, statufié. Eulalie le regarda. Il tourna la tête vers elle en retour. Il était très imposant, avec sa grande cape, sa capuche qui ne laissait rien voir de son visage, et sa tenue aussi rudimentaire que possible sous sa cape. Il avait l'air d'être un... Spectre. Qui était Gérard ? Le moment de raconter son histoire était enfin arrivé. Etrangement, il n'avait pas dormi depuis plusieurs heures, ce qui était en soi un énorme exploit, le "connaissant". Il ne parlait que par énigmes, de lui émanait une aura chaude et rayonnante, et pourtant... Quelles étaient ses motivations, à lui ?

<<A la taverne, j'ai été surpris par le livre que tenait Eulalie. Il était ouvert à une page précise, et la langue m'était totalement inconnue. Pourtant, j'avais énormément entendu parler de ce livre. Il contient un sort de magie très puissant. Je me suis toujours demandé comment il était arrivé entre ses mains. J'ai plus tard questionné Eulalie sur les gens qui étaient à la taverne, elle m'avait parlé d'une certaine personne avec un chapeau noir... Mais suivons l'ordre chronologique des évènements. Vous ne le savez pas, car j'ai disparu sans que vous vous en soyez rendu compte, Owein, mais je suis immédiatement parti à la bibliothèque, où j'ai pu lire et me documenter sur cet ouvrage. Plusieurs journées passèrent, mais absolument rien ne put confirmer mes craintes. Sur quoi Eulalie m'a rejoint. S'ensuivit une discussion agréable ponctuée de bons sentiments, au terme de laquelle nous nous pressâmes dans les catacombes à l'aide d'un passage secret de ma connaissance. En chemin, elle me raconta quelques fragments de son passé.>>

Il parlait sur un ton peu mélodieux. Il avait perdu cet aspect plaisantin, voire enfantin qu'il possédait lors des précédentes rencontres avec d'autres personnes. D'habitude, il donnait l'impression de toujours sourire, un sourire qui sonnait faux... Sa voix elle-même semblait soudainement beaucoup plus adulte. C'était le vrai Gérard qui parlait. Ou peut-être pas.

<<Nous y avons trouvé de nombreux maléfices. Ce n'était absolument pas comme cela, auparavant. De nombreux fantômes nous y attendaient, et Eulalie m'a vaillamment protégé mais ses coups étaient insignifiants. Seule la lumière pouvait les disperser, c'est pourquoi une torche eut raison d'eux. Nous poursuivîmes notre route dans ces couloirs aussi tortueux que sombres, quand nous tombâmes sur une pièce très spéciale... Sans que je ne m'en rendis compte. Je n'avais absolument pas idée d'être parvenu si loin sous le château de deux-cent tours. Seul un portail dimensionnel aurait pu nous faire franchir une si longue distance en si peu de temps. Nous y vîmes un démon enchainé, un démon de sang aux cheveux blancs. J'en avais rêvé de nombreuses fois. Son nom ne vous évoquerait rien, c'est une légende bien antérieure à celle de Túrin. Il pénétra dans nos esprits, toutefois je fus capable de m'en extirper, et de sauver la conscience de Eulalie. Ce n'était pas un combat, c'était simplement une rencontre. Cela ne compte donc pas.>>

Il le souligna, comme s'il y attachait beaucoup d'importance.

<<Eulalie s'étant évanouie, je dus la porter. Je réalisais alors que cet être avait souhaité notre venue, et nous avait amené dans cette pièce. Sa tête était baissée, et tout son corps était entouré de chaînes magiques incroyablement puissantes, car c'était une menace bien plus grande qu'un des démons du puits. Eulalie a perdu la mémoire à cause de sa seule présence. Mais je remarquais un objet d'une plus grande valeur que ce que j'aurais jamais pensé. Ma torche s'était éteinte, pourtant, un éclat luisait dans les ténèbres. Un éclat bleu. Je le ramassai, et m'en allai, sans rien dire de plus. De retour dans la bibliothèque, je trouvai un livre avec un alphabet similaire à celui du livre mystérieux. Ainsi, je pus le décrypter en trois jours et trois nuits, le temps nécessaire pour qu'Eulalie ne se réveille. Je fus également obligé de lutter contre Eliot, et ce dernier, voyant que je me laissais mordre sans me débattre, me laissa tranquille. Le matin du quatrième jour, elle se réveilla enfin, et depuis, elle est terne et vide. Je lui parlais de ce que je savais d'elle, tout le temps.>>

Il tenait la main de Laly, il semblait vraiment très triste.

<<C'est ainsi qu'elle a perdu la mémoire. C'est à cause de moi... Le sortilège se dissipera de lui-même dans une durée indéterminée, et forcer la récupération de ses souvenirs pourrait lui les faire oublier pour toujours. C'est très dangereux. Ainsi, elle restera avec nous jusqu'à sa récupération totale. Je ne l'ai pas exposée à un trop gros danger en la laissant toute seule. Mais heureusement que son compagnon était avec elle, afin qu'elle ne fut pas tentée de sombrer dans le coma. Ils semblent avoir une relation spéciale, mais Eliot sait dorénavant que j'agis toujours dans son intérêt lorsque je suis avec elle.

Je suppose que je dois également vous parler de Kalannar. Il va être exécuté demain, aux alentours de midi. Trois autres criminels seront également tués. Mais on ne peut pas être condamné à la peine de mort pour avoir déclenché une simple bagarre dans une taverne. Il y a en fait une raison très précise à son exécution. Une raison qui n'est pas publique. Une raison qui est autre que le flot d'insultes qu'il a déversé aux gardiens de sa prison. Une raison qui est autre que ses trois tentatives de suicide en cellule. Autre que le fait qu'il ait cassé le bras au garde qui lui avait apporté de la nourriture.>>

Il sembla réfléchir à ce qu'il venait juste de dire.

<<Hmmm... En fait, oubliez cela. Il a de bonnes raisons d'être exécuté. Mais cela cache quelque chose. Je pense qu'il sait quelque chose, ou qu'il est quelqu'un. C'est la raison la plus probable. L'Empereur ne tue jamais. Même les démons les plus puissants sont tout simplement scellés. C'est dans la loi, la peine de mort est censée être abolie. J'ai de bonnes raisons de penser qu'aux hautes sphères de la hiérarchie, se fomente quelque chose de peu clair. Et Kalannar en est la clef. Pourquoi l'annonce de sa mort aurait été rendue aussi publique ? Car cette annonce a été portée jusqu'ici. Sa mort est prévue pour demain, tandis que le village est à plusieurs journées de marche de la capitale. Ne trouvez-vous pas cela étrange ?>>

Il fermait les yeux. Il parlait sans rien voir. Il avait lâché la main de Laly pour se tenir dans la position qu'il semblait préférer, une main sur la joue, avec le coude posé sur la table, et l'autre main en train de tapoter tout ce qui ne bougeait pas : tasse, assiette, bord de table... Son thé était aussi froid que le ton de sa voix. C'est à dire encore un peu tiède. Son assiette fut néanmoins volée par Laly, sans qu'il ne fut capable de l'en empêcher. Il arbora un air déconfit. Il avait échoué à protéger ses biens. A présent, ils étaient partis pour toujours... Dans la bouche de son ennemie de table jurée... La stupéfaction de Gérard monta aux joues de ses deux autres compagnons qui éclatèrent de rire. Gérard, vexé, attrapa la bière de Ryooo et la but d'une traite, pour se venger. Ainsi commença une bataille des plus stratégiques pour finir les plats les plus importants restant sur la table, avant les autres. Car tout le monde désirait engloutir la dernière part du flan... L'évènement fut surnommé la "bataille du flan" par feu Owein et Ryooo, les généraux vaincus. La part avait été partagée entre Gérard et Laly, mais Gérard, fine bouche, avait gâché le crouton de sa tarte, provoquant l'émoi des spectateurs.

Après ce délicieux intermède de blagues et de bonne humeur qui se poursuivit un certain temps, Túrin, qui avait ri de bon coeur, calma les jeunes gens.

<<Gérard. Poursuivez votre récit, je vous prie...>>

Gérard se rassit à sa place. Ils s'étaient bien amusés. L'atmosphère se prêtait à la joie, et même Laly avait pu rire. Ce qui était une grande victoire pour tous.

<<Je crois sincèrement que la conspiration qui s'étend sur l'empire est sans pareille. Vous n'imaginez pas à quel point elle est terrible. Tous les éléments se lient entre eux... Je ne vous demande rien, cependant. Je vous prie simplement d'écouter mon histoire jusqu'au bout. C'est peut-être la dernière fois que vous l'entendrez.>>

Il ouvrit lentement les yeux, tous quatre l'écoutaient attentivement. Il porta son regard vers la coupe de thé à moitié remplie, trouble, et y trempa son doigt ganté. Le thé était très froid. Son récit commença alors à divaguer comme les remous du liquide. Il parlait sans véritablement y réfléchir, semblait-il.

<<Voyez-vous les courbes qui se dessinent à la surface de l'eau ? Avez-vous déjà tenté de jeter une pierre dans une rivière ou... dans un lac ? Il ne s'agit en aucun cas d'une allégorie temporelle, mais d'une illusion. Je naquis il y a environ 17 ans de cela, je n'ai pas en tête mon âge réel, jour pour jour, mais la dernière fois que j'ai pu regarder mon visage, j'en avais l'apparence. J'ai rencontré Kalannar dans cette taverne. Depuis ce jour, j'ai décidé de ne plus jamais combattre. Je vous y ai également rencontré, Owein, ainsi que Ryooo, plus tard. La vérité, c'est que j'étais seul.>>

Il marqua une pause dans son récit. Sa tête était légèrement penchée, il ne semblait pas être présent, mais plutôt autre part, perdu dans ses pensées abstraites. Dans un autre monde.

<<Je me rends compte que je n'aime pas raconter mon histoire. J'en suis désolé, vous ne devez rien comprendre. Un jour, j'ai vu la mer. Je me suis posé sur les vagues et j'ai respiré l'air marin. C'était agréable, une odeur salée, spéciale. Et puis, je me suis endormi. Et j'ai rêvé. J'ai rêvé de chacun d'entre vous. J'ai rêvé de Kalannar, d'Eulalie, d'Eliot, d'Owein, de Carrock, de Ryooo, de Túrin, de Doré. J'ai rêvé que nous étions tous ici, autour de cette table, et alors je vous racontais mon histoire. J'ai entendu ma propre histoire, contée par mes propres soins. Je me suis réveillé, et j'étais dans une pièce si sombre que je ne pouvais pas voir mes membres. J'ai alors décidé que je devais rallier Deux Cent Tours au plus vite, afin de vous retrouver. C'est ainsi que j'ai rencontré les premières personnes encore vivantes avec qui j'aie jamais pu parler. Il ne manque que Kalannar. C'est à cause d'une répercussion. Le fait que j'aie eu connaissance de l'avenir d'une façon différente de celle de laquelle j'ai rêvé a changé la course du monde.

Ainsi, je dois vous révéler la plus effroyable vision que j'eus lors d'un rêve... Ou plutôt, un cauchemar. Deux Cent Tours va disparaître. Je ne sais ni quand, ni comment, mais déjà je m'attèle, seul, à la préserver de sa destruction. Le fait que je vous en aie parlé a peut-être suffi à l'empêcher, mais je sais que c'est faux. La vérité, c'est que je ne sais absolument pas ce que vous réservera le futur. Ayez toujours à l'esprit que j'agis dans votre intérêt, même si cela vous semble impensable.

Les combats ont déjà commencé, partout dans le monde... Je n'y participerai pas. Vous, ce sera différent. Vous aurez la possibilité de changer le monde. Réfléchissez-y bien. Ce que je m'apprête à faire, seul ou sans vous, me mènera aux confins du monde... Et à ma propre destruction. Mais le règne de la terreur se terminera. L'été règne sur les contrées. C'en est bientôt la fin, le soleil disparaitra pour laisser place à un hiver féroce. Mais le printemps reviendra... Plus beau, plus splendide qu'auparavant. Il réchauffera le coeur des gens. Et j'en suis heureux.

Je redoute un danger plus grand encore. La dernière fois, nous nous sommes faits attaquer par un groupuscule ténébreux bien plus redoutable qu'il ne l'était prévu, et le fait que le seigneur démon ait pu nous suivre jusqu'aux abords du village est preuve que leur pouvoir grandit de jour en jour... Et un jour, nous n'aurons plus la liberté. Par liberté, j'entends... Vie.

J'aimerais que vous compreniez cette problématique qui nous entoure. D'un côté, Túrin et moi savons que le monde va être détruit. Nous allons donc devoir tout faire pour empêcher sa disparition, mais... Nous n'avons aucune idée de ce qu'il va se passer. Nos actions pourraient justement mener à cette destruction. C'est un très gros risque. Mais nous n'avons pas d'autre choix que de nous en remettre au hasard le plus total... La problématique de mon existence y est inextricablement liée.

Vous devez vous demander qui je suis. Je suis... Quelqu'un de ce monde. Et vous vous demandez sans doute pourquoi je cache mon visage.>>

Il se tut.

Tout le monde semblait attendre qu'il enlève sa capuche pour leur montrer son visage, mais...

<<Je suis défiguré. ... ... Au propre comme au figuré.>>

Tout le monde souffla. Ainsi, c'était réellement impossible de savoir s'il avait menti ou dit la vérité. Comme toujours. Cela marqua la fin de l'histoire de Gérard.

<<Vous savez tout, mes amis. Tout et rien. Savoir qui je suis réellement ne vous apprendra rien. Considérez-moi comme une idée.>>

Laly avait mangé un peu durant le récit, les autres s'étaient tus, car Gérard possédait un don de conteur absolument fabuleux, peut-être plus développé encore que celui d'Owein, bien que les deux styles ne fussent pas comparables. C'était un orateur exceptionnel, qui possédait une voix sombre et mélancolique. Riche et élégante. Il s'en dégageait une aura de tristesse, à présent. Une tristesse insondable, infinie, telle une mer de pensées et... de rêves...

( C'est une magnifique grotte taillée, pas une petite maison)

Owein était figé devant son verre de lait, incapable de le porter à ses lèvres ou de le reposer sur la table. Tout avait prit une telle ampleur en cet instant, l'aventure -car il semblait bien que ça en prenne la forme- venait de prendre un souffle épique. Mais le ménestrel ne se voyait pas comme un guerrier de légende, il avait plutôt été le compagnon qui accompagnait ces héros pour écrire leur histoire et qu'elle ne se perde pas. Ici, sans Gaheriet, il se trouvait être une des seules personnes prêtes à combattre, et cela l'inquiétait.
D'autant que le magnifique récit de Gérard avait à moitié révélé des choses sans les dévoilé vraiment, il n'avait en somme même pas avoué sa propre identité.
Un long silence suivit les paroles de l'être encapuchonné. Túrin ne riait plus, il était soucieux à présent.

"Merci, Gérard. Tes visions donnent sens aux miennes, j'y vois un peu plus clair désormais. MAis nous attendons encore quelques invités, dont une connaissance de longue date. Ne nous hâtons donc pas en révélations."

Afin de cacher son anxiété, Owein gratta quelques cordes de son luth, en tirant des sons rocailleux et apaisants, sans réelle mélodie.

" Excusez-moi, mais je ne comprends pas vraiment ce qui se passe... On dirait une haute-réunion de la Guilde, et pourtant je ne vois aucun héros! C'est aux grands combattant de sauver notre monde, pas à trois mendiants tels que nous!"

(Un doux euphémisme bien placé ne fait pas de mal au style narratif !)

Túrin eut un grand sourire affectueux vers Owein. Il avait déjà entendu ces mots il y a fort longtemps. Il y avait un lourd doute qui planait dans l'air, Laly semblait confuse, tandis que Gérard se taisait, plus ténébreux que jamais. L'atmosphère était tendue. Owein ne semblait pas faire confiance à Gérard. L'Ancien parla en se servant un petit bol de lait chaud.

<<Owein... Il n'y a pas de grand combattant, dans ce monde. Il n'y a que de petits héros. Un grand mal s'apprête à nous frapper, et il faut enquêter sur les possibles causes de cela. Et ce sans aller jusqu'à croire à une conspiration... Nous avons une chance, vous avez une chance inouïe : celle de pouvoir changer l'avenir ! Et vous avez cru à l'histoire de Gérard. C'est tout ce dont il avait besoin.

Ecoutez-moi bien, ami ménestrel. Et vous aussi, chevalier de la princesse. Vous n'êtes pas les plus adroit bretteurs que ce monde n'ait jamais connu. Mais votre musique possède le pouvoir de dissiper le mal. Votre âme est pure et courageuse.

J'ai énormément de choses à accomplir, moi aussi, car mon heure n'est pas encore venue. Et à présent qu'An du Skreo a disparu, et que SASEB est... occupé, il reste très peu de personnes capables d'assurer la sauvegarde de notre monde. >>

Túrin savait que la situation semblait très surréaliste pour des esprits aussi jeunes et peu éveillés que les leurs, et la pauvre Laly devait peiner à comprendre la moindre phrase. Mais il n'ignorait pas qu'à tête reposée, et après quelques jours de réflexion, il en irait autrement des récits et des révélations de la soirée.

Il devait doser. Il sentait quelqu'un approcher. Deux personnes. Elles étaient sur le chemin, et arriveraient bientôt. Il attendait également la réaction de Ryooo.

(ET LALY REPREND DU SERVICE ! JE CHOPE LE POST MAIS JE N'AI PAS LE TEMPS DE LIRE LE TOUT CE SOIR, JE VAIS JUSTE COMMENCER, LAISSEZ MOI JUSQU'A DEMAIN

(cool, comme quoi ça sert que je sois assis à coté de miss popi xD)
(bon j'édite mon rp d'avant moi xD)

...

Gérard soupira. Il avait l'air agacé que quelqu'un d'autre que lui se soit endormi au beau milieu d'une situation importante. Il se servit une autre gorgée de thé froid, avant de se retourner vers Túrin.

<<Laissons-le dormir, demain, il pourra reprendre une route différente de la vôtre.
-Je vais encore finir tout seul, je crois...>>

Le (vieil ?) homme et son dragon semblaient en parfaite harmonie, c'était comme une fresque aux personnages hauts en couleurs qui pouvaient bouger, une illusion, un rêve.

<<Vais-je me réveiller ?>>

La nuit était tombée voilà quelque temps déjà. Gérard sourit tristement à l'inconnu. Il parlait si bas que personne ne pouvait l'entendre. Laly se retourna vers lui.

<<Je crois que je vais d'abord faire quelque chose à propos de la mémoire de cette jeune fille.
-Gérard n'a-t-il pas expliqué que cela présenterait quelques risques ?
-Vous êtes un auditeur attentif, Owein, je vous en remercie. Je ne sais toujours pas vraiment ce qui vous a amené ici, une curiosité mêlée à un goût de l'aventure, peut-être...
-C'est juste, jeune ménestrel, mais voyez-vous, j'ai bien des ressources inconnues de la plupart des mortels...>>

Túrin fouillait en parlant dans son inqualifiable bazar, tandis que Gérard parlait toujours dans sa barbe, prononçant des mots intelligibles. Il ne disait pas grand chose de concret, en réalité.

<<Quel teint mat vous possédez là ! Vous pourrez payer en chèque, si vous voulez. Et chèque et mat ! Et j'avance le cavalier d'un mouvement ironique. L'autre est interloqué(e).>>

Il semblait rêver, déconnecté de la réalité. Seul un souffle s'échappait de ses lèvres.
Túrin finit par attraper une petite pierre grise finement taillée sur laquelle était peinte une forme pour le moins abstraite. L'encre bleue se mit soudainement à briller quand il s'en empara, ce qui attira l'attention des pauvres spectateurs à demi assoupis. Il s'approcha de Laly et la frappa au front avec la pierre, du côté où l'encre brillait. Un étrange symbole se dessina dans l'air, puis un bruit sourd retentit. Pour finir, Túrin, homme de réflexes, amortit sa chute avec un petit coussin.
L'animal au pelage rouge grogna et se jeta sur l'assaillant, mais, l'homme posa une main affectueuse sur son crâne, et aussitôt, il se calma.

<<Cela monte à deux ; le nombre de personnes qui roupillent. Qui sera le troisième dormeur ? Je vais reprendre une tasse de thé, au cas où... Sait-on jamais, on pourrait m'observer.>>

Laly ronronnait joyeusement, comme son compagnon le loup. Un sommeil réparateur allait s'ensuivre, durant lequel sa mémoire allait être progressivement restaurée. Une expression de souffrance passa furtivement sur son visage, et Gérard commenta tout bas qu'elle devait avoir vécu de terribles choses par le passé.

Túrin leva un sourcil. Ses gestes se stoppèrent soudain, sa respiration devint muette à l'instant où il aperçu le chat. Celui-ci semblait dormir paisiblement, aux anges,sans se soucier du monde qui l'entouraît. Et pourtant, il semblait avoir déjoué l'attention de l'arbre-Fay... Sous l'incompréhension de l'assistance, le maître des lieux s'approcha doucement de Ryooo, et d'un geste rapide et précis attrappa le matou par la nuque.

"Par Cernumos! Que fait un Matagot dans ma demeure! Qui t'envoies? Réponds, maudit!"

Le chat s'échappa des mains de Túrin. Doré ouvrit un oeil. Le chat courba l'échine, hérissant chacun de ses poils, crachant entre ses crocs aigüs. Owein n'en croyait pas ses oreilles. En tant que ménestrel, il connaissait nombre de ballades contant les aventures de ces chats-lutins et leurs cousins, chats-foireaux, chats courtauds et chattes Margottines. Sous ses yeux, le Matagot grandissait, s'allongeait, ses poils s'assombrissaient. Ayant atteint près de soixante centimètres au garrot, surtout occupés par des pattes frêles et disproporsionnées, une tête triangulaire trouée par deux yeux jaunes mauvais et de longues moustaches. S'asseyant sur ses pattes arrières, il miaula ces mots:

"Du calme, Heaume d'airain, Seigneur de Dor-Lómin, Totem-ocre, Túrin lame-rune, Marchand de Fantasmagories, Voleur de fées, Assassin de rois, Noble Libérateur, Infâme traître, Amis des dragons, Pieds-chaussés, Empereur aux sept vies, Trancheur, Celui-qui-se-rebella-contre-les-Dieux... Tes noms sont aussi nombreux que les rôles que tu as endossés durant ta longue vie, Túrin. Nous les Matagots étudions depuis longtemps ton épopée..."

Il s'arrêta un instant pour lécher de sa langue râpeuse une de ses pattes.

"En réalité, c'est Mebd, reine du monde de Faërie, qui m'a envoyé ici. Elle sent que d'importants événements vont bientôt avoir lieu, et elle m'a envoyé, moi, Abel, descendant de la lignée des fiers Chevaliers-Matagots qui régnaient sur ces terres bien avant que l'Homme descende de son arbre, au temps myhtique où la vie était Lutte et Harmonie. Toute la faune et la Flore féérique, depuis longtemps retirées de ce monde, souhaite prendre de nouveau rôle dans ce nouvel Acte. Ainsi suis-je leur ambassadeur dans cette réunion secrète".

Seul Túrin semblait comprendre ces références trop anciennes pour êtres inscrites dans un livre d'Histoire. Ce dernier carressa son menton, pensif.


"Ainsi, la majorité des forces non-impériales sont présentes ce soir. Celà est aussi bien. Mais vous ne pourrez jamais surmonter les épreuves qui vous attendent sans les forces de l'Obscur. C'est pourquoi nous devons nous rendre sur le champ à Deux-Cent Tours afin de libérer Kalannar de son exécution. Il aura son rôle à jouer, en bien ou en mal, avant la fin de toute chose. Êtes-vous prêts au combat?"

Ryooo se gratta la tête.

-C'est vous le chat ?

Il cligna des yeux.
Et re-bailla la main sur la bouche. mit sur son nez ses verres et les rajusta avec son index.

[Suite à un mouvement de flemmardise . L'auteur de ce post n'arrive pas à écrire la suite de son RP. A vous de le faire progresser. Gerard, Owein me connaissent assez pour savoir qui je suis et comment je jouerais. Je m'absente. Pour qq jours. ]

La tirade de Túrin redonna, à la manière du combat qui s'était déroulé à Forgerune, toutes ses forces à Owein. Plein de vigueur, il répondit à l'affirmative. Abelsembla bien loin de partager cet enthousiasme.

"Il est hors de question que je me lance de cette manière dans une quête si risquée, accompagné d'humains, sans avoir consulté ma reine. Cependant, sachez que même sans un Fay à vos côtés, tous les peuples de Faërie qui croiserons votre route durant votre périple vous aiderons du mieux qu'ils le pourrons, peut-être sans se manifester, simplement en déposant un bouquet de champigons à l'entrée de votre tente les jours de disette, faisant tomber une douce pluie les jours de soif, en faisant bruisser les arbres lorsque le danger approche. Soyez surs de bien recevoir la bénédiction de la reine Mebd."

Sur ces mots clairs et concits, il s'en retourna en sautillant vers le manteau de la nuit, revêtant l'apparence d'un dandinant matou. Et sans un mot, chacun se mit au travail. Owein passa à la meule afin d'aiguiser son épée, Owein enlevait un à un ses bracelets pour éviter d'en casser au combat, Ryooo se promenait bras balants, demandant à la cantonade qui avait besoin d'aide.
Doré se mit en mouvement pour la première fois devant les hôtes. Figé, il était une mythique statue imposante, en mouvement, c'était une masse de muscles, une fantastique créature couleur Or, un dieu primitif échappé des cataclysmes antédiluviens. Sorti de la grotte, il étira ses ailes membraneuses dans un bruit de bourrasque.

"Grimpez sur mon dos, humains. De nombreux courants aériens nous séparent de Deux-cent tours, courants qu'il faudra parcourir avec célérité si l'on veut éviter l'exécution de Kalannar!"

Comme si cette nuit avait été prévue depuis des cycles lunaires, quatres sièges étaient disposés entre les épines dorsales de la créature, attendant les voyageurs.

Ryooo s'étonna et grimpa à califourchon sur son siège. Il était à présent parfaitement réveillé. son épée trônant sur son dos. Sa chemise verte flamboyante. Son panta-court déchiré.

-Je le fais pour m..la princesse.. chuchota-t-il, à moitié pour lui même et pour les autres.

Mais il savait aussi. que c'était parce qu'il aimait s'amuser.

Tout le monde s'activait. Gérard leva la main pour attirer l'attention.

<<Que les choses soient claires. Je ne compte pas me battre. Je pense que s'embarquer dans un conflit est inutile et ridicule. Votre manière de raisonner est abstruse. Enfin, si vous voulez toujours verser votre sang et faire souffrir les autres, mes bénédictions les plus sincères vous accompagnent.>>

Un mouvement d'hésitation parcourut le groupuscule. Un léger silence plana, mais Gérard n'en était pas à son premier sauvetage de conversation.

<<Qu'allons-nous faire à propos de Laly ?
-Je suggère que nous la laissions ici, après tout, nous n'allons pas la forcer à nous accompagner si elle ne veut pas nous suivre. Et Ryooo, vous n'êtes pas obligé de venir, vous non plus, n'est-ce pas ?
-... Ça ira, je crois.>>

Ryooo regarda son poing fermé, et l'ouvrit, dévoilant sa paume sur laquelle un minuscule petit "G" luisait. Il n'y avait plus aucune trace de la "brûlure" qu'il avait subi il y avait de cela quelques jours. Avait-il rêvé ? Gérard resta immobile un moment, regardant Owein et Túrin s'affairer autour de lui, puis il s'empara du corps frêle de la jeune fille, la chargeant sur son dos. Il ne parut pas ployer sous son poids, et ne poussa pas non plus de "hmpf !" sous l'effort. Il l'installa confortablement sur le dragon doré, qui ne réagit pas.

<<Reviendrons-nous ici par la suite ?
-Probablement, oui. Sinon, ce sera de ma faute, car je n'aurai pas réussi à vous protéger.
-Je vais laisser quelques affaires ici, alors. Evitons ce genre de culpabilité prématurée. Nous sommes là pour agir. Je connais Deux-cent-tours comme ma poche, nous pourrons nous échapper par les ruelles dont même l'Empereur ne soupçonnerait pas l'existence, si besoin est, je vous indiquerai plusieurs points de rendez-vous. Auriez-vous une carte, monseigneur ?
-Certainement ! Elle date, mais je ne crois pas savoir que la cité ait subi de changements majeurs.>>

En parlant, Túrin avait attrapé une grande carte qu'il déroula à même le sol. Tout le monde s'assit en cercle autour de la carte pour se concerter. Gérard l'examina silencieusement avec l'expertise - semblait-il - d'un maître. Il pointa son doigt sur un des quartiers centraux.

<<Le dénommé Kalannar sera exécuté ici. Mais il ne sera pas le seul exécuté.
-Le Matagot m'a appris que ce ne sera pas chose aisée de se déjouer de l'attention des gardes pour agir. Des forces surhumaines semblent à l'oeuvre. Il se pourrait que les gardes ne soient pas que des gardes.
-Comment ça ?
-Ce n'est rien, nous verrons là-bas.
-Nous faufilerons-nous dans la foule, ou atterrirons-nous directement sur l'échafaud à dos de dragon ?
-Séparons-nous en deux groupes...>>

Ainsi, un plan commença à naître dans leurs esprits. Gérard faisait glisser son index sur la carte pour indiquer les possibles parcours d'échappatoires. Túrin commentait les plans. Après quelques instants de débats, ils emportèrent quelques vivres qu'ils chargèrent sur le dragon. Carrock peinerait à les suivre en vol, c'est pourquoi il allait rester auprès d'Owein durant une partie du trajet. Quant à Elliot, il avait disparu mystérieusement. Tous sentaient qu'ils ne seraient pas bien loin. Ryooo semblait anxieux. Owein semblait excité. Gérard s'approcha des deux.

<<Vous n'êtes vraiment pas obligés de venir. Le voyage de retour n'est pas certain. Mais si nous revenons, soyez sûrs que vous serez fort bien récompensés. Ecoutez, Ryooo. Vous voulez assurer la sécurité de votre mie, je pense que c'est le meilleur moyen d'y parvenir. A vous de voir. Vous pourriez aussi...>>[/color]

Une silhouette noire se découpa dans la porte d'entrée, sous la lune.

Túrin demanda aux trois jeunes gens de rester là où ils étaient, puis il sortit un instant. Doré grognait férocement. Une sorte de spectre se tenait sous les étoiles. Ils eurent une (très) courte discussion, puis le survenant parut donner quelque chose, et il s'évapora subitement. Les trois n'avaient pas bien vu la scène, mais il leur avait semblé que cette ombre noire s'était tout simplement dissipée dans l'air. Ils se frottèrent les yeux, et Túrin revint. La scène n'avait pas duré longtemps, seulement un éclair, et les trois compagnons n'avaient même pas pensé à bouger.

<<Tenez. C'est pour vous. Prenez-en bien soin.>>

La Légende glissa quelque chose dans la main de Gérard. Personne ne sut ce dont il s'agissait.

C'était au tour de l'homme sans visage de paraitre anxieux. Enfin, sous cette épaisse cape et sous ses différents manteaux, il aurait tout aussi bien pu passer pour une fille, s'il n'avait pas eu une voix de jeune homme.

<<Il n'y a que quatre sièges, je remarque. Et nous sommes cinq, en comptant Laly.>>

Gérard soupira. Il décida qu'il la porterait malgré lui sur ses genoux, son siège étant assez spacieux de toute façon. Túrin rit et dévoila un dernier siège, plus haut, plus grand, plus confortable : le sien. La capuche vivante semblait déçu, en un sens. Ils redoublèrent d'efforts pour se préparer.

[Je ne sais pas si je continuerai plus tard ou pas, mais je dois y aller. Et Ryooo, ça te ressemble bien, ça, de dire que tu ne vas pas RP, et de rajouter trois lignes juste après... Enfin bref, j'ai essayé d'adapter, mais bon.]

[Roh.. j'ignore de quoi mes mots sont fait. Mais bon. Pas grave. Tu peux faire tuer Ryooo si tu veux. ça m'est un peu égal ^^. Je suis content c'est tout]

Doré marcha doucement sur l'herbe rase, de pas de géant en pas de géant. Quand il arriva au bord de l'aplomb rocheux, il baissa lentement la tête. La falaise descendait droit vers Forge-Rune, perdue dans la nuit. Il perçut la lumière émise par la lanterne du veilleur de nuit, rien d'autre sous les étoiles. C'était l'heure la plus noire, mais le soleil les talonnerait bientôt, et il fallait atteindre les flèches de Deux-cent tours avant lui.
Il leva la tête vers les étoiles, ces guides du voyageur nocturne. Elles brillaient d'une pâle et froide lueur, mais d'un éclat si délicat à travers le ciel sans nuages qu'elles réchauffèrent le coeur de tous les voyageurs.
Le dragon déploya ses ailes dans une bourrasque gigantesque, les laissa flotter quelques instants immobiles, puis bandant toute sa masse musculaire, s'élança dans le vide. Mis à part Owein et Túrin qui avait l'habitude de voler, un haut-le coeur parcouru les compagnons qui perdirent tout repère dans cette chute vers le sol. Puis tendant ses ailes au maximum, le dragon prit un courant ascendant et ce fut pour tous le bonheur et l'excitation, ce sentiment unique d'être dans les airs, nageant dans cet océan de ténèbres. Le vent claquait sur les joues d'Owein, qui emplissait sans cesse ses poumons d'air des hauteurs jusqu'à que la tête lui en tourne.

Ainsi, la créature la moins discrète du monde traversa des lieues et des lieues à l'insu de tous, survolant terres sauvages et champs, bosquets et rivières. Le ménestrel avait perdu toute notion du temps, sur ce siège inconfortable avec Carrock sur ses genoux. Il essaya bien d'engager la conversation, mais le vent et la vitesse rendait toute discussion impossible. Le temps passa ainsi, seuls les esprits des vents hurlant dans leur royaume de ténèbres.